Yasmine Hugonnet

Fragment
de Yasmine Hugonnet


La danse que je quête depuis quelques années met en scène une part d'invisible, un dialogue avec une autre chose qui en mouvement mis à part le corps seul. On peut nommer ceci La Peau de l'Espace, un corps imaginaire qui nous entoure et se trouve à l'extérieur entre les corps des spectateurs et des danseureuses, on peut nommer l'imaginaire des spectateurices qui produit des images dans les moments où le visible se suspend dans la danse, et c'est aussi un espace perceptible au sein du système nerveux des danseureuses, où lors d'une suspension de la production, lorsque nous chérissons une écoute ou une attente cela permet de recevoir de nouvelles informations. "Laissez une place à une réponse", quelle soit une image ou une perception est un acte qui permet de recomposer l'action suivante hors du sentier évident du rebond musculaire et de la suite physiologique immédiate et la plus logique. Aujourd'hui je souhaite cependant confronter ce processus à la question de la vitesse. Jusqu'où cette forme de langage chorégraphique peut -elle survivre si nous explorons plus de vitesse?
Je souhaite confronter également mon écriture et les principes même de cette danse avec le rythme et la musique. Effectivement l'espace temps sensoriel, et fictionnel qui s'agite dans la danse que nous avons créé avec la compagnie jusqu'ici, est un espace-temps qui peut se condenser ou s'étendre. En quelque sorte un espace temps qui peut subir des changements chimiques, de densité d'air ou des compressions temporelles. C'est un espace de fiction anatomique qui permet de laisser le geste avoir le maximum de potentialité.
Comment là aussi ce processus de modulation d'espace-temps peut-il se confronter à un rythme, ou à la musique? La musique est quasi absente de mes créations depuis 2014. Je crois que la musique m'emmène dans un espace beaucoup plus émotionnel. Je pressens une danse constituée de dépassement, au sens d'hyper extensions des êtres qui cherchent à dépasser des frontières en inventant de nouveaux chemins anatomiques et sensibles. Une danse faite de renversements de postures, d'engagement des organes et de variation radicales de tonus. Je souhaite voir un moment d'engagement, de dépassement par un effort d'agrandissement.
Yasmine Hugonnet


Chorégraphie, textes et conception Yasmine Hugonnet
Avec Stéphanie Bayle, Ilaria Quaglia
Collaboration artistique et composition musicale Michael Nick
Assistante Simona Rossi
Administration/production Olga Benne
Diffusion/production Jérôme Pique


Biographie

Yasmine Hugonnet
Elle s’intéresse au rapport entre forme, image et sensation, à la germination de l’imaginaire, à la (dé)construction du langage chorégraphique, au processus d’incarnation et d’appropriation. Née à Montreux (Suisse) en 1979, elle vit et travaille aujourd’hui entre Lausanne et Paris. Elle grandit au Mali de 3 à 6 ans et dès son retour elle étudie la danse classique puis part à Paris à 13 ans pour intégrer le Conservatoire National Supérieur en Danse Contemporaine. En parallèle, elle s’intéresse à la danse contact, l’improvisation, le Buto et la recherche chorégraphique. Elle danse pour les chorégraphes Jean-Marc Heim (CH) en 2004-2005, Jo Strömgren (NO) en 2003- 2004 et Luc Petton (FR) en 2001. Elle intervient comme assistante du chorégraphe pour Superflux (2011) de Jean-Marc Heim et Espèces (2012) de Rosalind Crisp. Elle entreprend une recherche autour de la notion de « Présences » au sein du programme de Master en chorégraphie « Dance Unlimited » aux Pays-Bas (2003-2004). Sa réflexion sur le geste est fortement nourrie par des rencontres notamment avec Odile Rouquet, Peter Goss et Lisa Nelson.

Elle crée ses propres projets chorégraphiques dès l’an 2000, d’abord au sein du collectif Synalèphe. Elle travaille à Taiwan avec des artistes non-voyants puis développe son travail personnel dès 2006. Lauréate des Pépinières Européennes pour Jeunes Artistes, elle est artiste en résidence en Slovénie en 2006 où elle crée « RE-PLAY », un trio qui sera joué dans plusieurs festivals internationaux, (Impulstanz 8tensions Vienne, Temps d’Image Tanzhaus NRW Düsseldorf…), Latitude de pose un premier solo, présenté notamment au Festival Artdanthé à Paris, puis OF OTHER, A, A ! A ? AA._ des pièces de groupe, sont coproduites par Maska (SI) et la Tanzhaus NRW à Düsseldorf (DE).

De 2009 à 2013 elle s’engage dans un long temps de recherche solitaire en studio. En 2009 elle fonde sa compagnie Arts Mouvementés à Lausanne et produit ensuite trois solos : en 2013 Le Rituel des Fausses Fleurs, en 2014 Le Récital des Postures. En 2015 La Traversée des Langues présentée aux Printemps de Sévelin dans le contexte du Programme Commun des Théâtre de Vidy et de l’Arsenic à Lausanne. Yasmine Hugonnet approfondit son travail sur le mouvement de l’attention, l’idée de la posture comme réservoir et, à travers ses processus chorégraphiques, développe une pratique de la ventriloquie.

En 2015, sur une invitation de Virgilio Sieni au Collège de danse de la Biennale de Venise, elle propose le projet Le Récital des Postures Extensions, qui invite entre 7 et 20 performeurs à s’approprier la partition des 20 premières minutes du Récital des Postures. Cette performance proposée pour des espaces non-théâtraux et multi- frontaux dispose les corps à la suite, ils tracent un chemin, une colonne humaine. Chacun opère la partition selon sa propre temporalité. A partir de 2015, Yasmine Hugonnet est artiste associée pour deux ans au Théâtre Sévelin 36 à Lausanne avec le soutien de Pro Helvetia dans le cadre du projet YAA. En février 2015, Le Récital des Postures est sélectionné pour les Journées de la Danse contemporaine Suisse et, en 2016, dans le cadre de la plateforme Aerowaves. En 2016, elle crée La Ronde / Quatuor, pièce pour 4 danseurs, au Festival des Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis et à la Biennale de Danse de Venise. En mars 2017, elle a présenté Se Sentir Vivant, un nouveau solo dans le cadre du Festival Programme Commun à l’Arsenic, Lausanne. En 2017, Yasmine Hugonnet reçoit le Prix Suisse de Danse (Création actuelle de danse) pour le Récital des Postures. Le solo Se Sentir Vivant est par ailleurs été sélectionné aux Swiss Dance Days à Lausanne en février 2019.

A partir de 2018, elle est soutenue par le Théâtre de Vidy à Lausanne : elle créée en novembre 2018 le trio CHRONOLOGICAL, sélectionné pour une tournée en Suisse par le Fonds des Programmateurs, programmé au Festival Programme Commun (Lausanne, 2019), et en tournée en France, Italie, Belgique. En septembre 2019, crée et présente la performance in situ Extensions dans le parc Bellerive /Théâtre de Vidy avec douze jeunes interprètes de la région lausannoise. En 2020, elle prépare sa prochaine création Seven Winters avec sept interprètes dont la création aura lieu du 22 au 26 septembre 2020 au Théâtre de Vidy puis à la scène nationale de Besançon (coproducteur et partenaire dans le cadre du dispositif européen Interreg) et qui sera en tournée en 2020/2021 dans plusieurs villes européennes.

En octobre 2019, elle débute une résidence de trois mois à Palerme dans le cadre de Palermo calling, un projet mis en place par l’Institut Suisse au Palazzo Butera. En décembre 2019, elle présente plusieurs projets dans ce cadre : une adaptation du projet Extensions avec des danseurs italiens, ainsi que les solos Se Sentir Vivant et Le Rituel des fausses fleurs que la chorégraphe a transmis à la danseuse italienne Ilaria Quaglia.

En 2019, elle prépare sa prochaine création Seven Winters avec sept interprètes dont la création a eu lieu du 22 au 26 septembre 2020 au Théâtre de Vidy puis en tournée au Festival d’Automne à Paris (en co réalisation avec l’Atelier de Paris et le Centre Culturel Suisse de Paris), à la scène nationale de Besançon (coproducteur et partenaire dans le cadre du dispositif européen Interreg), et à l’ADC à Genève.

En 2020, Yasmine Hugonnet a été lauréate du Label + romand avec son projet Les Porte-Voix créé en 2022 au Théâtre de Vidy et présenté à la Biennale Internationale du Val de Marne. Dans ce cadre, en partenariat avec Plateforme 10 à Lausanne,  elle crée le projet « Jeux de Perceptions » avec l’artiste et curatrice Charlotte Imbault, un cycle d’ateliers chorégraphiques et de performances qui intègre des conférences et invite à expérimenter et jouer avec l’œil, le poids, le geste, les œuvres et la pensée.

Dans la continuité de ce projet, en 2024, elle créé « Sacs à Murmures / Die Flüterstüten », le premier spectacle destiné au jeune public de la compagnie (coproduction festival Steps, Théâtre de Vidy et T2G Centre Dramatique National).